Dans le magasin

Cela avait commencé par de petits détails. Le matin, quand elle ouvrait le magasin, elle avait parfois l’impression que des choses avaient bougé depuis la veille au soir. Parfois dans la journée, elle entendait comme des bruits de petits pas sur le plafond. De temps en temps, la porte de la chambre froide au fond du magasin tremblait.

Elle savait bien, elle, que tout ça n’était rien.

Elle devait avoir oublié comment les choses étaient placées la veille. Des petits animaux devaient se balader dans les combles. Le froid devait parfois faire trembler la porte de la chambre froide. Non, vraiment, rien de surnaturel dans tout cela. Elle refusait de croire toutes ces histoires que les gens racontaient. Elle n’écoutait pas les anciens employés qui disaient que le magasin était hanté. Certains racontaient même qu’ils avaient croisé un fantôme. Elle refusait de croire à toutes ces histoires.

Mais un jour, elle se dit que peut-être les autres avaient raison.

Ce matin-là, quand elle ouvrit le magasin, ce n’était plus seulement quelques petits objets qui étaient mal placés, mais des rayons entiers qui n’étaient plus à leur place. Ça, elle s’en serait souvenu !

Après avoir passé plus d’une heure à tout replacer et à se demander si elle devait appeler la police ou un exorciste, elle put enfin s’installer s’installer à la caisse pour vérifier qu’il ne manquait rien. Au moment où elle commençait à compter, elle entendit un bruit étrange. Comme des pas sur le plafond. Elle s’arrêta pour écouter et cette fois-ci elle en était sûre : les pas étaient bien trop lourds pour être ceux de petits animaux. Mais ils étaient aussi trop légers pour être des pas de personnes adultes. Elle alla ouvrir la trappe au plafond pour vérifier ce qui se passait dans les combles, mais rien, ni personne, ne s’y trouvait. Tout ça était de plus en plus étrange, mais plus rien ne se passa pendant encore quelques heures.

C’est pourquoi, quand les bruits de pas revinrent, elle fut surprise pendant une minute. Puis, agacée de ne pas comprendre ce qu’il se passait, elle suivit la direction dans laquelle semblaient partir les pas. 

Pof, pof, pof, trois pas vers la droite.

Pof, pof, pof, trois pas vers le coin.

Pof, pof, pof, trois pas en avant.

Cela l’avait menée devant la porte de la chambre froide. Le silence retomba.

Elle s’apprêtait à tendre la main vers la poignée, quand la porte se mit à trembler, comme si quelqu’un essayait de sortir de la chambre froide. Elle recula, un peu effrayée, et décida d’attendre que la porte arrête de trembler pour l’ouvrir, mais la porte ne s’arrêta pas. C’était même de pire en pire. Désormais, la porte ne tremblait pas seulement, des coups retentissaient.

Boom !

Boom !

Boom !

Comme si quelqu’un essayait de défoncer la porte de l’intérieur.

Paniquée, elle se mit à crier : « Stop ! Arrêtez, s’il vous plaît, arrêtez !”

Elle courut vers l’entrée du magasin. Alors qu’elle était sur le point de s’enfuir, les coups cessèrent. Elle s’arrêta, se retourna pour regarder la porte.

Pof, pof, pof.

Des bruits de pas s’éloignèrent de la chambre froide.

Pof, pof, pof.

Les bruits de pas  se rapprochèrent du centre du magasin.

Pof, pof, pof.

Les bruits de pas s’étaient arrêtés juste au-dessus de sa tête.

Tremblante, elle leva les yeux. Rien. Elle soupira de soulagement.

Soudain un petit rire d’enfant se fit entendre au-dessus de sa tête. Comme si cela avait été un signal, les coups sur la porte de la chambre froide recommencèrent, encore plus fort, encore plus rapides.

Elle hurla de peur et s’enfuit hors du magasin.

Quelques mois plus tard, le propriétaire du magasin ferma la boutique. Plus personne ne voulait travailler dans ce bâtiment.

Il se demandait bien pourquoi.

Laisser un commentaire